Numéro 97: juillet 2024

Notre doyen s'en est allé...

Sam 2737

Gérard Bergeon, le doyen des codolétiens âgé de 96 ans, s'en est allé ce vendredi après-midi. Codolétien de souche, il s'est investi pour notre village en tant que conseiller  municipal et en tant que viticulteur pour le développement de notre ancienne cave coopérative.

Codolétien de coeur, Gérard avait décidé après le décès de sa femme Janine en janvier 2014, ,à l'instar de Maupassant de rester jusque la fin de sa vie dans sa maison dans laquelle il est né le 04 avril 1924.

"Je ne la puis plus quitter maintenant, cette maison où je suis née, où j’ai vécu, et où j’espère mourir. Ce n’est pas gai tous les jours, mais c’est doux, car je suis enveloppée de souvenirs."( souvenirs Guy de Maupassant)

En  sa mémoire , trouvez ci-dessous un article écrit en avril 2016, relatant son parcours de vie

 

Histoire d'une vie

(article écrit en avril 2016, pour ses 88 ans)

                                                                                 

A l'heure oû sonne  son 88 ème  printemps, à l'acmé  d'une vie bien remplie, l'occasion nous  est donnée,   en  partageant  avec lui quelques fragments d'histoire de  sa vie, de lui souhaiter  un joyeux anniversaire. C'est l'opportunité également au travers  du cheminement  de ce  codolétien de souche de saluer  tous  les autres  codolétiens  qui l'ont accompagné dans  son existence. Histoire, également, de reformer en quelque sorte, l'espace  d'un instant, la  bande de copains, copines des années 38/48 qui donnait vie aux ruelles  de notre village.

88 ans est un long voyage ponctué d'événements. C'est aussi une  expérience  qui marque le corps  et l'esprit, laissant parfois des cicatrices indélébiles qui donnent à ce cheminement un sentiment d'épreuve. Gérard a cheminé en sécurité, heureux, sa vie durant, d'abord dans la chaleur du  cocon familial, puis auprès de Janine, son épouse. Aujourd'hui que  cette dernière est partie, la vie de Gérard n'a plus la couleur vive  du bonheur qu'il a connu et chaque instant présent lui remémore un passé  qu'il ne  veut surtout pas oublier."tout ce  que  je fais me rappelle Janine"...

A reparler de  son passé, l'amène à oublier  quelques temps sa mélancolie, alors  redonnons lui le sourire en évoquant avec lui quelques séquences  de  sa vie. Tolèrons quelques défaillances ponctuelles de sa mémoire consécutives à un ancien accident  vasculaire  cérébral.

  Sam 2729Tel le visage plein et potelé d'un poupon, sur lequel  le temps ne  semble pas  avoir eu prise, Gérard Bergeon prend plaisir à remonter le temps, prétexte à  questionnement sur  son passé, sur le sens de  sa vie, sur  ses amitiés ....

Le 4 avril 1928, dans le corps de ferme situé actuellement aux 12 rue du pont, naissait Gérard,  fils unique   d’Augustine et Emile Bergeon, agriculteurs. A cette époque les maternités  étaient  très rares et les accouchements  se  faisaient  couramment à domicile. Les parents  du nouveau- né  venaient  d’acquérir depuis peu ce corps de ferme : « cette maison, le propriétaire l’a proposée à mon  grand-père qui était très  intéressé…ma foi,  mais  qu’il a refusé  dans un premier temps parce  qu’il n’avait assez de sous …le propriétaire est revenu et lui a  vendu en lui disant qu’il le connaissait( le dit en provençal) et avait confiance  en lui et qu’il lui paierait à tempérament… et sans passer par le notaire…à l’époque la parole avait de la valeur…ma foi ! »

A l’heure de l’arrivée  du poupon Gérard, la maison  des Bergeons abritait également  les  grands parents et une tante  et un oncle. Tout ce monde   contribuait selon ses possibilités au travail de la ferme. Quelques  hectares en polyculture, notamment du millet pour les  balais,  culture du vers à soie, des tomates, deux  hectares de vigne, chèvres et une vache  pour le lait, un à deux  cochons pour la viande. L’entreprise familiale était  en autosuffisance et prospérait par le rajout de  quelques parcelles de terre.

Le jeune Gérard  grandit, heureux, dans ce  cocon familial sous la protection  de sa mère  et de  sa tante   qui  prendra de plus en plus de place ( vers la fin) face à l’évolution du diabète de cette dernière.

                                         Sam 2733Comme tous les  gamins de Codolet, Gérard fréquenta l’école municipale jusque quinze ans. Ses  copains de l’époque étaient Raymond Hérault, Sylvain Roux, Georges Pical,  Mathieu Louis, Bonhomme Roland et René, Tavan Francy et les  copines, Odile Labrot-Roux, Mado Ayme-Rivier, Francette (trou de mémoire)………  Après le certificat  de fin d’études, Gérard  rejoint son père sur l’exploitation  de la ferme. Il apprend  le dur métier d’agriculteur en vivant les améliorations technologiques, passant ainsi successivement du mulet au tracteur « on avait acheté un gros tracteur pour la polyculture…ma foi… et  un motoculteur pour la vigne, mais il était trop lourd…ma foi. ».

Durant les années précédant  son départ pour  l’armée, Gérard convainquit son père d’engager l’exploitation familiale  vers la viticulture. Petit à petit l’exploitation va alors abandonner la polyculture pour  se tourner vers la culture de la vigne, d’abord en s’agrandissant par le rachat lopins de terre puis par l’achat de droits de plantation  en  Ardèche nécessaires pour replanter sur  Codolet.

Le passage vers  cette monoculture  se fit progressivement. Pendant cette transformation, Gérard apprend le travail de la terre  avec  son père, s’initie  également au travail de la vigne qui lui semble moins éprouvant.  Il s’intéresse de plus en plus à la mécanique, à la conduite du tracteur  et de la  voiture familiale : «  j’ai passé mon permis à Nîmes …avec la voiture de mon père…l’inspecteur m’a fait  faire  une longue  marche arrière  dans le Boulevard Victor Hugo près des arènes …eh op...c’était bon…ma foi ! »

A 20 ans (1948), son service militaire lui donne l’occasion de voir d’autres horizons. Loin de sa Provence, de son soleil, des cigales, le voilà parti pour  l’ Allemagne, à Baden Baden. Les  souvenirs  de cette année passée dans le Bade-Wurtemberg laissent à Gérard une trace d’un séjour agréable, certes loin de la terre, de la vigne et de sa famille, mais  qui comblait  l’une de ses passions, l’automobile. En effet le codolétien se  retrouve  chauffeur de hauts gradés à l’état-major de la santé, poste dans lequel il excelle et  qui lui vaut la reconnaissance de ses supérieurs. De retour  en 49 à Codolet, il est rappelé pour faire une période militaire  de 15 jours à Marseille où là encore il est chauffeur, mais cette fois d’un GMC.

       Sam 3656 2 Au retour de l’armée,  l’exploitation  familiale  se dirige de plus en plus vers la viticulture. Gérard s’occupe alors  des côtes du Rhône, son père  du vin de table  et  du reste  de la polyculture.

De ces années, Gérard garde les  souvenirs d'une période heureuse, rythmée par le travail ,  les sorties  avec les copains, d’inondations presque annuelles mais  qui ne les dérangeaient pas  du tout «  on montait le réchaud  à l’étage, on surélevait les meubles … on montait les animaux ( chèvres et le mulet dans le grenier au dessus des écuries  avec un plan incliné...et on attendait que l’eau parte…on en avait maximum 25 cm ». C'était aussi l'occasion de se déplacer dans le village avec un "bateau plat " de 5 mètres, qui agrémentait ces épreuves d'un caractère ludique les rendant encore plus "acceptables".

Gérard  apparait dans  ces années  comme un « coq en pâte » dans un cocon familial chaleureux. Son existence est essentiellement  rythmée par le travail de la vigne, mais amateur de mécanique  et  d’automobile, Gérard a su se ménager  du temps  pour ses passions, n’hésitant pas  à démonter  et remonter des moteurs. " j'ai eu au total trois Mercedes...et une  DS que je suis allé chercher à Paris"" pour  la sortir ... il m'a fallu prendre  un chauffeur jusque la porte d'Italie... et après op..ma foi!"   

A remonter le temps, la mémoire de Gérard est à forte épreuve, laissant parfois apparaître des oublis ou imprécisions dans la chronologie des  dates, événements, mais  qui  n’empêchent nullement d’apprécier son chemin de vie.

Il reprend  la ferme à son compte (trou de mémoire), encadré  par son père. Lui aussi,  continu à développer   l’exploitation par le rachat de parcelles souvent mitoyennes aux  siennes pour accroître les surfaces  exploitées, alors exclusivement de vigne.

Alors qu'il est âgé d'une trentaine année, Gérard fait la rencontre de Janine lors d'après-midi dansantes à Avignon. A l'époque, divorcée avec un fils à charge, elle travaille  aux galleries (magasin) d'Avignon. A Codolet, le foyer familial s'est fortement transformé consécutivement au décès de  son oncle  et de  sa maman. Gérard est alors managé par son père  mais  surtout par sa tante qui tend à remplacer la mère défunte. Il fréquenta Janine trois à quatre années  avant de l'épouser ( trou de mémoire). Elle devint progressivement une pièce importante  dans la vie  du couple. Après  avoir  soigné avant leur décès  le père  et la tante de son mari, Janine  devint la maitresse de maison sur laquelle Gérard  pouvait  compter  et se reposer  de tous les tracas  de gestion. L'exploitation exclusivement viticole se développe pour  atteindre vingt cinq  hectares. La seule ombre  au  tableau...l'absence d'un descendant " il aurait repris l'exploitation...ma foi".

En 1988, à 60 ans, Gérard se met en retraite, vendant toutes  ses parcelles, soit à des particuliers en terrain constructible, à la mairie  pour ériger le lotissement  et le  reste  à la SAFER 

en comptre-partie d'une rente.

Pendant 26 ans, Janine  et Gérard, vont profiter d'une retraite  bien méritée. Gérard bricole à la maison sous le regard protecteur de sa femme, toujours prêt à la conduire en course  ou en promenade.

Ce bonheur pris  fin le 16 janvier 2014, jour  du départ de Janine.

          Sam 2737 Aujourd’hui, l’homme a toujours  le visage  d’un poupon  bien en chair, en bonne santé  avec malgré tout quelques  failles  dans  sa mémoire, une locomotion réduite, mais dont , malheureusement, les yeux  ne brillent plus comme ils  brillaient aux interpellations de Janine. L’élan de vie a fait place à un repli sur soi, comme pour vouloir retrouver dans la solitude, celle qui ne le quitte pas de sa journée.

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Les obsèques de Gérard Bergeon

Ses obsèques auront lieu le jeudi 11 juillet :

- la mise en bière  se fera à 13h30 à la chambre funéraire de bagnols( Roc Eclerc, 267 rue Léon Fontaine)

- Cérémonie religieuse à 14h30 à l'église de Codolet

- l'inhumation se fera à 15h30 au cimetière de Codolet

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Date de dernière mise à jour : 07/07/2024

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